EXSANGUES

Il n’est pas d’autre mot

Qui puisse convenir

À leur état physique

Et leur état mental.

Ils ont dû naître ainsi,

Vieillards avant le temps.

 

La vie qu’ils ont menée

Et qu’ils mènent encore

Ne les accable pas

Comme ces malchanceux

Sur qui le sort s’acharne

Et qui n’y peuvent rien.

 

Enfants, le regard neuf

Qu’ils posent sur le monde

N’a pas l’air habité

Du désir de connaître.

Ils donnent l’impression

D’avoir déjà tout vu.

 

En devenant adultes,

Ces humains taciturnes

Ne verront dans la rose

Que sa mort au jardin

Et porteurs d’idées noires,

Ils joueront les Cassandre.

 

Ils n’éprouvent jamais

De la mélancolie ;

Pour cela il faudrait

Qu’ils aient des souvenirs.

Ils sont par vocation

Fossoyeurs de l’espoir.

 

En n’ayant pas brûlé

Du feu du moindre amour

Dans l’âtre de leur cœur

Pas de braise et de cendre.

Un battement, peut-être ?,

Dans la statue de pierre …

 

Pierre SELOS